Et si ... Paris était gris, Paris était la porte ouverte au négatif. Washington était le moment, New-york le mouvement heureux et Paris est gris. Paris est l'assaut des doutes. Il s'agit d'un retours aux cadres (intérieurs - ces obligations qu'on se donnent) (professionnel - le retour au système dans son milieu naturel et ses errances) (social - maintenant il faut être socialement plus clair, fini les brouillages des ambassades et l'insouciance des vacances-stagiairantes).
Le retour de quelque chose de négatif qui bouffe tout, jugements, perdition. Entre le moi social (en route), le moi profond (perdu en route), le moi de l'instant (amaré à la bienvellance), le moi militant (bouillonant), il y a l'impression d'un éparpillement retrouvé et étouffant. Ainsi le besoin de trouver des instants concrètement pleins à se mettre sous la dent (j'ai faim), de produire des petits choses en écrire (j'ai faim, j'ai peur), de penser à sauvegarder des bonheurs miniscules (comme l'impression d'un retour). D'un coup, le retour à la réalité dans ce qu'elle a d'inconfortable, dans les dissensions, les doutes, les vides qui me ponctuent.
Alors renaît l'impression de "je suis celle qui, toujours, réussi à faire ce qu'on attend de moi, mais qui ne sait pas ce qu'elle aime, réellement, faire". Sur mon curriculum vitae , il y a marqué "faculté d'adaptations" (directement et indirectement), il pourrait aussi y avoir, et il y a "réfléchit très vite". Je sais faire, je sais comprendre. Les premiers instants sont importants pour moi, je saisis mon sujet, appose les nouveaux jalons qui me sont donnés. Je sens ensuite l'atmosphère du lieu de travail. Et j'ai compris. Je travaille. Je suis fiable. Je suis parfois même intéressante. Mais je m'en fous. Ce n'est pas inintéressant, mon esprit n'est pas inintéressé, il regarde de loin, opinine, tourbillonne et travaille ce qu'il faut (juste ce qu'il faut).
Ensuite, quel impact sur la société de ce que je fais (le contenu de mon travail) et de ce que je suis (en tant que bourgeoise en puissance) ? Ensuite, quelle sécurité pour moi (les conditions matérielles a priori d'un esprit libre, celui qui n'est pas toujours à compter ses tickets restaurants, à ne pas oser consulter son compte (en tant que pas encore bourgeoise du tout, en tant qu'étudiante dans une ville riche)) ? Mais qu'est-ce que je recherche ? Les injonctions personnelles sont contradictoires, aussi bien que les injonctions sociales. Et il y a pas, ce qui pourrait être, la transcendance (ou la révélation) d'une vocation, ou d'une intérêt profond.
Pourtant, cet été, j'étais bien. Quand J. m'a vu il a sourit très fort. La question est claire : qu'est-ce qui nourrit ? La question est alors: en dehors de l'exception qui n'est que par ce qu'il y a bien un rythme à briser, qu'est ce qui me nourrit ?
Est-ce la France ? (De Nantes, il y a eu Paris, immensité vivante, peut-être qu'il faut autre chose ? Mais, est-ce une fuite ou la réponse à un besoin profond?).
Qu'est-ce qui me nourrit et qu'est ce que j'attend ?
Qu'est ce qui calmerait mon esprit qui dévore et recrache ?
Qu'est ce qui me ferait m'abandonner aux choses ?
Ou bien, il s'agit d'un raidissement soudain, écho maladroit mais passageur d'un retour aux normes, aux cadres (phobie tissée après les trois ans de "classe préparatoire").
Je cherche des pistes partout, en urgence, comme si une panique venait me prendre d'assaut. Je vais me calmer dans les bras de G. (il m'apaise. il n'est pas mon miroir, il n'est pas les réponses, mais il me nourrit de sa présence, il m'apaise). Je vais me calmer. Mais il faut rassurer la tempête, prendre dans mes bras, longtemps, mon être entier, et le nourrir encore, de choses auxquels il croit.
Parfois, ce qui m'apaise c'est ranger, parfois ce qui m'apaise c'est produire (extérioriser dans quelque chose de palpable, en ce sens, le rangement aussi c'est palpable), parfois ce qui m'apaise c'est l'art ou plus spécifiquement parfois c'est la fiction (j'ai toujours peur de la fuite, mais), parfois ce qui m'apaise c'est marcher longtemps, parfois ce qui m'apaise c'est écrire.
Coincée, la peur d'être coincée (par le plus visible et le plus invisible).