Mercredi 27 août 2014 à 17:08

Quand mon état d'esprit est flou ou que j'en ai peur, j'ai du mal à le formuler "je me sens... je suis ..." les mots peinent à traverser. Puis, d'un coup je me formule la chose. Et la phrase se répète dans mon esprit pour faire résonner son adéquation, elle revient et revient.

*

J'aime chanter. Les villes sont des espaces qui traquent le silence. Mais j'aime chanter dans la rue, aller habiter les murs, les rues vides. Et des phrases se rencontrent, au hasard, et se laissent modeler.

He didn't want to scream around (you)
Il ne voulait pas crier autour de toi (aux alentours), encore un détour pour arriver à toi

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Dimanche 3 août 2014 à 0:02


Le son est saturé, mes doigts se plaquent et se crispent. Envole-toi, envole-toi? Malgré la lourdeur expressive, je les sens reprendre surface et couler sur le blanc du clavier, et je les sens aller comme une rivière. Je rêve toujours que je joue les morceaux que mes oreilles écoutent, plus ou moins consciemment, plus ou moins fort. Je rêve que je joue, comme pour matérialiser l'énergie qui se glisse dans mon corps, les sons que coulent et rebondissent au fond de moi.

***

La dépression a agit sur moi comme une force annihilante, prenant possession, peu à peu de tout mon être, pour le plonger dans une léthargie profonde. Il s'agissait alors de résister aux assauts répétés de cette masse informe de tristesse. Et à chaque bataille perdue - elles l'étaient toutes, de ce que je me souviens - se voir perdre du terrain et descendre d'un étage. Il m'a fallu alors beaucoup de temps pour comprendre que je ne bataillais pas contre un simple faiblesse mais contre quelque chose qui me mangeait, quelque chose de plus gros que moi. Chasser le "c'est un peu difficile en ce moment, mais ça va, je ne me laisse pas abattre". Peu à peu, se relever devient plus dur et la rage rugit devant l'impuissance, devant tant d'efforts dispensés mais vains alors que l'énergie se fait rare. Et il était impossible de fuir le champ de bataille. Et il était impossible de fuir. On en pouvait qu'attendre, paralysée par la fatigue profonde, les angoisses. On ne pouvait qu'attendre, attendre que le temps passe, ou trouver un échappatoire le temps de quelques heures. Retrouver un peu de bonheur, mais le retour au noir était alors si douloureux. Que fallait-il choisir ? L'oubli et l'attente neutre ou les contrastes douloureux ? En même temps, dans ces instants, j'étais rassurée de me rendre compte de ma capacité à ressentir. Je n'avais pas tout perdu, tout n'était pas perdu, altéré. J'aurais tellement aimé pouvoir hurler, pleurer de désespoir. Je n'étais qu'une attente, une fatigue, et une langueur de plus en plus pesante. Les choses se ternissaient autour de moi. J'essayais de contenir les assauts de noirceurs qui m'assaillaient. Oui, "j'ai pas le temps là, j'ai pas le temps, je peux pas, j'ai pas les armes". Quand la boîte de Pandore finissait pas craquer et s'entrouvrir, je devenais terrifiante de douleur, de noir et de pleurs. J'essayais de tout refermer très vite. Dès fois, il y a eu A. qui me prenait dans ses bras et essayait de me calmer, de répondre à mes questions pressantes, à la marée de mes angoisses. A. vivait un peu la même chose et elle était dans les mêmes gammes d'intensités. Alors quand A. était là, je savais qu'elle avait les épaules, que je ne lui ferai pas (trop) peur. J'essaie de rassembler mes souvenirs, mais tout est brouillé quand j'essaie d'assumer cet angle de vue. Quand je n'extraie pas les moments de vie mais que je tente de voir les élans sous-jacent, la tristesse toujours refoulée, la perte de soi, l'absence à soi qui envahit.

Je voulais retrouver ces souvenirs. J'y peine encore un peu. Je voulais car je réfléchissais à savoir à quel point j'étais effectivement arrivée à m'extraire de tout cela. Je me rends compte qu'il m'a déjà fallu une année scolaire pour me défaire de la peur, me dire que j'étais sortie du lieu (physiquement et matériellement parlant) de la bataille, que je n'étais plus là, que c'était différent. J'ai pris beaucoup de temps à me remettre physiquement de tout cela. J'ai beaucoup dormi, avec un sommeil très troublé, traumatisant et lourd. Et là, à la lueur d'un nouveau réveil froissé - même s'ils se font de plus en plus rare - je pensais au fait que je reste dans une sorte de léthargie. Une léthargie protectrice cette fois. Inconsciemment, je m'isole des choses et des gens, comme si cela pouvait me faire mal. Cela me rappelle mes double sommeil douloureux. Je me réveille, mais en fait je dors encore et je rêve que mon esprit est coincé dans mon corps. Mon corps dort et j'attends la sonnerie du réveil pour qu'il réagisse. mon esprit se débat pour réveiller mon corps avant, il panique à l'idée de se retrouver coincé. Finalement, je me réveille vraiment et la frontière entre rêve et réalité se sont brouillées. Je ne suis plus dans la tristesse à fleur de vie, je ne suis plus dans cette langueur innommable, cette attente de délivrance, cette répulsion constante de tous les assauts de ma douleur mais je ne suis pas pour autant sure d'être réveillée. Je suis à fuir - inconsciemment - toute sorte d'attache. Au début de l'année, je faisais un blocage violent pour tout ce qui était prévu régulièrement. Je détestais l'idée de remplir mon empli du temps avec des choses hebdomadaires. Je me sentais tout de suite mal, le spectre d'une nouvelle prison. Il me fallait du temps, de la liberté, ne serait-ce que sur le papier. Les premières semaines avec beaucoup de travail m'angoissaient. Pas que le travail en soi me dérangeaient mais l'idée que je n'aurais peut être plus de temps me faisait très peur. Alors je dégageais du temps, encore du temps, pour ne rien faire. Organiser des sorties, oui mais pas trop, il me fallait mes plages blanches. L'idée de limite a priori m'a toujours froissé et là le sentiment s'est terriblement accru. Pas plus tard qu'aujourd'hui, j'ai encore eu ce sentiment en regardant - alors qu'elles viennent juste de commencer - quand terminaient mes vacances. L'idée d'un horizon fixe me fait mal.

Je me rends compte que d'une certaine manière je me suis encore assez isolée, d'une autre manière. Dans une optique protectrice cette fois. J'ai quand même beaucoup de choses, j'ai passé beaucoup de temps avec mes amis mais au fond, je me demande si je n'ai pas encore peur. Peur de la vie, par ce qu'elle pourrait rouvrir la boîte de Pandore, par ce que ça sera peut être quelqu'un, par ce que je ne me maîtrise plus et je sors de tout cela totalement floue à moi-même. La dépression a fait sur moi l'effet d'une léthargie, dont je ne suis pas encore réveillée. Chaque espace de soi est à reconquérir, à réveiller, à rassurer. J'ai peut être juste, inconsciemment, peur de ce que je peux y retrouver.

Mais je commence en essayant d'aller à la rencontre de mes souvenirs de l'année dernière.
Et à continuer à retrouver la parole.

(Mon envie irrépressible de voyage: la recherche d'un terrain neutre et isolé pour refaire l'expérience de soi en "sécurité" ?)
 

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