Samedi 27 mars 2010 à 12:23

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Il roulait son nez dans le contour d’une clope, la silhouette enfumée dans l’horizon du soir. Son regard fuyait dans les étoiles à en avoir le vertige, perdu dans la poésie facile. Il caressait du doigt la surface brouillée de la table en verre, en appuyant fort, pour dessiner des lettres qui ne formaient pas de mots, pour mélanger des signes sur la transparence brisée.

Il regardait son verre avec la tentation de l’ivresse mais le monde autour de lui tournait déjà. Pensif, il sentait sa peur devant le murmure de cet appel au trouble, ces exceptions accumulées qui sentaient déjà la légèreté au présent, contre la pesanteur future. Pensif, il déshabillait les bulles de sa bière et serrait les lèvres comme quand il résiste à son désir. Ne regarde pas en bas, ne regarde surtout pas en bas. Trop tard, ses yeux sont kidnappés par le son d’une porte qui s’ouvre. L’espoir s’y engouffrait qu’il était déjà perdu. L’entrée est ailleurs et la rencontre échoue. L’équilibre d’un désespoir entier se fracasse avec le même bruit métallique des clés dans la serrure, d’à côté. Désespéré, il se raccroche au verre qui glisse entre ses lèvres. Mais il a regardé en bas.

Alors, reculant dans le gris de ses yeux, pressé par la chute, il pleure. Des petites larmes succombées qui viennent lui embrasser les yeux, puis, la fureur alanguie lui remplie les paupières. Il étouffe de ses larmes en regardant le ciel, comme pour dramatiser une chute en pathétique : raccrocher aux astres la folie d’un espoir. Les choses se précipitent et il tombe tout entier en débris, ces miettes de soi qu’il ne cesse de jeter par la fenêtre depuis qu’elle n’est plus là. Mais cela ne suffit pas. Il se met à boire, àprendre les souvenirs à pleine bouteille et les vider cul sec, en folie, dans l’instant, faire valser son foie dans le bonheur d’hier, dans ses « nous deux » qui ne sont plus que connerie. Il se soûle au désir de leur corps qui ne se trouveront plus, aux sourires grandis de chaque matin ensemble, où elle était belle mais il n’avait rien dit. Il boit au passé pour mieux en vomir. Il s’épuise et il respire en soulevant sa poitrine. La criblée de balle de la vie lui ravale les poumons. Vaincu. Il retrouve dans l’écho d’un berceau, le souvenir de violence qui le raccroche au monde. Dors, mon enfant. Son esprit continue de filer : « Et s'il abandonne ? Qu'à reste -t'il ? Les chants mal-abris des formules oubliées ? De celles, qui ne s'oublient pas,  mais s'enterrent. » Ses yeux le brulent. Mais il s’en rêve.
 
(Sinon, le soleil, les autres et le bordel qui s'en découle. Ca va)
Par Madness.of.Love le Samedi 27 mars 2010 à 14:04
Il s'en rêve.
C'est toujours très poétique.

Un moment d'envol dans la vie de cet homme, un partage léger de sa souffrance, j'imagine un balcon, une table, le verre de bière et la cigarette, j'imagine très bien, je le visualise.

Et j'aime beaucoup déshabiller les bulles.
Par Nowhere.Town le Samedi 27 mars 2010 à 23:21
MAGNIFIQUE. (non, honnêtement, cet article est une merveille)
Par LambeauxDeVie le Dimanche 28 mars 2010 à 13:58
Troublant. Merveilleusement troublant.
Par Y.Nos.Extendemos le Dimanche 28 mars 2010 à 14:44
Immenses les malles, immenses ;)

Et je maintiens ce que dis Nowhere Town. C'est véritablement beau.
Par Atome le Dimanche 28 mars 2010 à 14:48
imagine mon bonheur quand je suis tombée sur cette vidéo ("my father's garden") Bonne continuation; il faudra que je te relise, mais je ne suis pas dans de bonnes conditions pour ça en ce moment, alors j'aurai forcément du retard. Bien désolée pour ça. Je ne fais pas un très bon auteur non plus en ce moment, et dernièrement, c'est relativement désastreux et banal. C'est mauvais, comme le reste.
Par Atome le Dimanche 28 mars 2010 à 18:55
La noirceur n'est qu'un passage. Je te lirai quand même quand je le pourrai.
Par Badabouum le Dimanche 28 mars 2010 à 20:24
Class :)
Par SweetLove le Dimanche 28 mars 2010 à 21:21
Oui, elles sont de moi, merci beaucoup. (:
Il faudra que je prenne du temps cette semaine, pour venir lire par là. Depuis plus d'une semaine, je ne lis plus rien, ca ne va plus.
Par maud96 le Dimanche 28 mars 2010 à 21:53
Dentelles sur l'image, on dirait des chauves-souris. Dentelles de ton texte, mots de transparence noire.
Par Got-a-secret le Dimanche 28 mars 2010 à 22:40
Très bel article, comme toujours :)

C'est dans une chanson italienne, "de toi je ne me lasse jamais", c'est juste la phrase que je trouve belle !
Et oui, l'article est plutôt joyeux, enfin je suis pas vraiment dans la sensation que je décris, je voudrais juste. Mais ça ne va pas mal non plus :)

<3
Par glandeur-rockmantique le Lundi 29 mars 2010 à 4:13
Cette image !... magique !!!
Par Got-a-secret le Lundi 29 mars 2010 à 20:05
Ouii bien sûr, bon faudra que j'me débrouille pour prendre un avion et tout, et je pense que je resterais 15 jours, mais c'est bien :)
Par SweetLove le Mercredi 31 mars 2010 à 14:59
Il s'en rêve.
Je la trouve magnifique. Comme s'il partait, loin loin au fond de son verre, vers les profondeurs de ses souvenirs pour mieux succomber. C'est d'une poésie incroyable, un malheur criant écrit en douceur.
Par Satine le Mercredi 31 mars 2010 à 17:14
[ poétiques, les soutien-gorges de la photographie! ]
Par redingote le Mercredi 31 mars 2010 à 21:15
Il me semble qu'une fiction réussie est une image qui se dessine parfaitement dans les esprits des lecteurs. Ici, comme d'autres l'ont déjà dit avant moi, on visualise parfaitement la scène. Tu as un talent incontestable.
Évidemment je ne suis pas là par hasard... C'est grâce à ton commentaire. Je tenais à te répondre. Pour l'habillage, je n'ai aucun mérite, c'est juste une image trouvée au détour d'une page internet. Et ton autre compliment m'as particulièrement touchée... Alors, merci.
Par Elhombreloco le Jeudi 1er avril 2010 à 19:57
Ton style léger et racé plait à mon coeur =)
Par ou-allez-vous-d0rmir-ce-soir le Jeudi 1er avril 2010 à 20:02
J'adore, j'adore tes ateliers d'écriture. Mais celui-ci particulièrement.
"raccrocher aux astres la folie d’un espoir", n'est-ce pas l'essence même des Hommes. Vivante tragédie.
 

Chuchoter à l'oreille









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