J'ai les yeux rouges, à force d'avoir pleurer. Je ne sais pas très bien pourquoi, comme un trop plein de lisse dans l'océan d'une gare, la tristesse d'un après-guerre, quelque chose. J'ai les yeux rouges, mais les paupières lisses, je ne me maquille pas. Je rêve. Je suis peut être fatiguée d'une semaine avec trente heures d'épreuves à gratter du papier, puis une heure à traduire St Augustin "Nondum amabam, sed amare amaban et amans amare". Peut être oui. Concours Blanc, KB dans le jargon. Peut être. Je suis fatiguée mais je crois que je ne prend pas tout cela au sérieux. Sinon, je serai comme ceux qui partent en voyant le sujet. Si on analyse la phrase dans sa nudité, le sujet se dégonfle. Et c'est comme un oral, il faut faire quelque chose d'artificiel et donc de potentiellement drôle. "Bonjour, vous ne me connaissez pas mais je vous parlez vingt minutes des journées de juin 1848". Bien sûr, à part l'histoire, je n'ai pas beaucoup travaillé. J'ai fait des choses, quand même. Et puis, j'ai rendu mon nombre de page réglementaire. Alea iacta est. Ce n'est pas fini, encore douze heures. Latin et Espagnol. Bien sûr, je suis un peu anxieuse, car profondément, je me sens intruse, incapable, comme si ce début d'année avait été une suite de miracles. Mais je me suis arrêtée. Le temps a arrêté de filer, filer. Comme la semaine dernière, comme samedi à avaler Paris, et ses lumières. Se fondre dans la foule des autres pour se souvenir que Noël approche. La tour Eiffel scintille, elle me fascine toujours autant. "En fait je voulais juste avoir un peu de tes nouvelles." Te revoilà toi. Cela me fait plaisir. Je ne n'ai pas oublié, bien sûr, mais c'est différent. C'est Nantes. C'est l'année dernière. Je m'arrête alors, ce matin. Et je me met à pleurer. Je ne m'aime toujours pas. Je me hais d'être floue et laide. J'aime ma vie, je ne comprends toujours pas ce que je fais dedans. J'ai du mal à avancer là-dessus. C'est comme s'il y avait deux réalités. Celle qui fait que dans l'élan, je puisse et celle qui bourdonne toujours, celle où je ne peux pas me voir. Je me traine des problèmes d'adolescentes. J'ai changé, tout de même, je travaille beaucoup là dessus mais il y a des moments où l'intensité remonte et je me cracherai, me vomirai entière. Et je m'en veux. C'est physique. Il faudrait que je prenne confiance, un jour. J'y penserai.
Je suis bien ici, profondément. J'aime Paris et l'immensité qu'elle ne cesse de murmurer. Me balader dans les rues. Cette autonomie. Lire, beaucoup. L'amour, l'amour, l'amour. Tes yeux, tes yeux. Des fois, cela me fait peur aussi. Quand il me manque en une journée. Quand je sens que tout se resserre. Encore, encore.
J'ai les yeux rouges. Mais je me sens mieux, au fond. Je suis bien ici, profondément. J'aime Paris et l'immensité qu'elle ne cesse de murmurer. Me balader dans les rues. Cette autonomie. Lire, beaucoup. L'amour, l'amour, l'amour. Tes yeux, tes yeux. Des fois, cela me fait peur aussi. Quand il me manque en une journée. Quand je sens que tout se resserre. Encore, encore.