Dimanche 27 septembre 2009 à 13:03

http://imparfaiite.cowblog.fr/images/6a00e5508e95a988330120a566488e970c640wi.jpgTout me semble si décalé ce matin. Je ne sais. J'ai l'impression que les choses sont différentes alors qu'elles semblent les mêmes. Il est 11 heures et 44 minutes. Je jette comme si souvent un regard sur ma fenêtre pour vivre le temps qu'il fait dehors. Mon lit est envahit de livres, de prise de notes. J'entends la conversation des gens qui parlent en vélo. Il y a la musique aussi et le bruit du clavier. Et l'intérieur qui vibre. Tout parait s'inscrire dans le cadre d'une normalité relative. Mais j'ai l'impression étrange. Brouillée. que je pourrais déchirer le coin des coins comme on arrache la tapisserie. Ma main hésiterait presque à essayer. Voyons.

Il y a eu quelque chose hier. Un truc tellement fou que, peut être, ca n'a pas fini m'emmêler le regard.

Je marche dans la rue, l'épaule qui crie par le poids du sac, en bandoulière. Je vais à la médiathèque. Quand on arrive, c'est un grand gris, et il y a une cage noire, la bibliothèque est à l'intérieur. Je commence à monter les marches. J'entends. Un bruit, tout petit, tout court. J'ai cru un moment que j'avais rêvé mais je suis curieuse, j'ai tourné la tête. Rien. J'ai avancé les jambes. Je l'ai vu. Il y a avait dans les coins de béton, une fille assise, sur un bloc. Elle pleurait. Elle était jolie, brune, les cheveux courts, un air impressionnant. A peu près mon âge, peut être plus vieille. Je monte une marche. Mon coeur se rétracte. J'en redescend une, deux, trois. Je vais vers elle. Arrivée presque à sa hauteur, je me sens bête. "Qu'est ce je fous là ?" Je cherche dans mon sac un paquet de mouchoir, je me place devant elle. Elle me jette un regard confus. Entre le "Laisse moi tranquille", le "Qu'est ce que tu fous là ?", la honte d'être regardée ainsi. J'ai envie de m'enfuir. Par ce que je me sens bête avec mon paquet de Kleenex. Je me laisse soudain à penser que si vraiment elle voulait être toute seule, elle aurait fui la rue, même la rue déserte. Inspiration. Phrase qui sort toute seule : "Tu veux un mouchoir ?". Son regard s'embrouille d'autant plus, car j'y vois maintenant de la réelle surprise. Elle me fait oui de la tête. Je lui sors le papier blanc. Elle le prend. Et l'agrippe, le froisse dans sa main. Je suis toujours debout. Je m'assoie à côté d'elle. Le silence s'installe. Comme depuis le début, je me demande toujours ce que je fous là. Je repense à tous les moments de silence de ma vie qui me reviennent. Et je me met à fixer les gens. Faire semblant que je me distrais. Nouvelle inspiration. "C'est un histoire de coeur ?". La fille se retourne d'un coup, vers moi. Je la détaille du visage. Vraiment, je la trouve jolie. Elle essuie une larme rageusement et me dit : "oui". J'esquisse un sourire que j'essaye de rendre compréhensif. Je l'encourage à continuer. Elle le sent : "C'est si prévisible ? Je fais la gamine éplorée sur le banc de square qui pleure un amour perdu ?" Aie. Rage. Prend cela dans ta tronche. Impulsion, je réponds : "Ouais, enfin bon, t'aurais pu au moins choisir un coin avec des arbres et des petits oiseaux". Merde, je pense, pourquoi j'ai dis cela ? Mais la réponse semble lui plaire car elle soupire et, je crois voir un sourire. Avec un ton d'excuse, elle me dit : "Je me fais pitié." Je lui réponds : "Tu sais, on fait toujours ce qu'on peut. ". Je me maudis de mes phrases vides. Mais cela n'a pas l'air de la déranger. De nouveau, le silence. Mais, différent. A plusieurs moments, elle se tourne vers moi. Je sens que les mots sont sur le bord de ses lèvres. J'aimerais qu'ils sortent, sans moi. Ses yeux sont toujours rouges et ils se brouillent par a coups. Elle envoie valser ses pleurs par des gestes rageurs ou des petits coups de mouchoir. Elle s'arrête des secondes entières pour me dévisager. Elle essaye de me comprendre. D'un coup, je sors : "Moi non plus, j'ai aucune idée de pourquoi je suis là, à côté de toi. Mais je crois qu'on s'en fout, non ? ". Elle se relève brusquement. Merde, j'ai peut être mal joué. Mais non, elle se détend. "Tu as raison. On s'en fout.". Je la sens plus à l'aise. Je brise une nouvelle fois le silence. "Tu veux m'expliquer ce qui se passe ?". Elle croise les genoux, pose sa tête sur poing. Elle réfléchit. Les mots s'entassent au bord de mes lèvres à moi. J'ai envie de dire qu'elle est pas obligé, que je m'en fous, mais non c'est pas vrai mais en même temps voilà par ce que ... c'est le bordel, je me tais. Elle dit, d'un coup, me met au pied du mur : "Amour impossible.". Elle me lance cela avec un regard de défi. Moi, ca me retourne. Moi, je sais plus quoi faire. Par ce que... Par ce que ca hurle que je savais très bien, depuis le début, pourquoi j'étais venu la voir. Par ce que ca me hurlait que c'était dégueulasse ce qu'elle vivait. Par ce que ca me hurlait des milliers de choses. Et je sentais son regard brulant, comme un victoire d'une partie d'elle qui me disait, l'air hautain : "AHAH et elle fait quoi Mère Theresa ?". Je me suis sentie submergée. Je l'ai prise dans mes bras.

Sous le coup de la surprise, elle s'est laissé faire et j'ai vu peu à peu tomber toutes ses barrières. Son corps s'est détendu et les pleurs se sont intensifiées. Elle m'a paru minuscule. Et moi énorme. Elle s'est accrochée à moi. Elle murmurait des trucs, je ne les comprenais pas. A la réflexion, je me pense qu'elle se les disait plus pour elle-même. Je resserrais mon étreinte. Mes pensées s'entrochoquaient tellement qu'elles formaient un énorme vide. Le temps a défilé. Il y avait les bruits de la ville, les bruits de ses pleurs, le bruits de mon intérieur en folie et tout cela formait une sorte de silence. A un moment elle a commencé à parler plus fort, elle s'est sortie de mes bras. Elle m'a regardé. "Je ne comprends plus rien, pas. Je veux pas comprendre." "Qu'est ce qui se passe ?". Elle s'est remise à pleurer. Et puis, elle a pris une grande inspiration. Elle m'a regardé dans les gens pour ne rien louper de ma réaction. C'était comme une scène de film. une scène de film crétin et mon coeur s'est mis à battre sans que je sache pourquoi. "Je ..." Silence et puis, d'un trait ; "Jesuisamoureeusedemonprofd'histoire".

Je l'ai relaché d'un coup. PAM. Un mur dans ma tronche. une envie de hurler. PAR CE QUE TOUT CELA CRIAIT CRIAIT CRIAIT. J'avais l'impression d'être un film français avec de beaux moments, enfermée dans quelque chose, qu'on allait sortir et me faire "surprise, c'est dans la boite, ca sera génial dans le nouveau Klaspish.". Elle me regardait toujours sans comprendre. J'ai foutu un coup de pieds dans mon sac. J'avais envie de partir. Elle a repris son regard du début : "Ca te choque, c'est ca?". "Genre" "Bah alors quoi ?". Je réponds pas. Silence. Silence. Silence. Je reprends ma respiration : "Excuse moi." Silence. Je continue : "C'est juste que des fois j'ai l'impression que la vie se fout bien de ma gueule." Elle me regarde, me poussant à continuer. "J'ai été, ou je suis, je ne sais pas, amoureuse d'un prof." BAM, dans sa gueule, cette fois. Elle me regarde. On se regarde avec des yeux méfiants. Je pense qu'on réfléchit exactement à la même chose. Notre amour dans les bras, on avait l'orgueil de se dire qu'on vivait quelque chose d'unique. Cette inconnue qui vient voler le romanesque de notre histoire imbécile, ca chamboule. D'un autre côté, j'imagine qu'elle a du, comme moi, espérer quelqu'un qui la comprendrai, où il n'y aurait pas de risque de malentendu, où la personne fait un petit sourire et disant "oh, oui moi aussi, j'ai eu un béguin pour un prof". Et l'envie de fracasser la tête à cette même personne. Et tout les autres qui ne se rendent pas compte. Mais même si cette sensation est lourde, elle donne un sentiment d'importance, de garder un trésor que personne peut comprendre. Elle brise le silence, sec : "Mais toutes les histoires sont différentes, de toutes façons." Oui. On se calme. Je lui demande "ca fait longtemps ?". "Oui et non. Depuis avril-mai, je crois. Mais c'est pas précis.""Oui, je comprends.". La pression qui avait envahie l'air s'évapore peu à peu. Elle retourne dans mes bras. Et on discute. Je la console. J'ai l'impression de me voir, d'avoir un enfant aussi. Elle est au moment où elle se rend compte qu'elle n'a pas le choix. Et la révolte intérieur, tout cela. Des moments, je la serre très fort, par ce que je sais à quel point c'est dur et à quel point il n'y a rien à faire. Je balance des phrases vides mais ca lui fait un peu de bien. Le temps passe. J'ai aucune idée de l'heure qu'il est. On parle aussi de ses parents, de ses amis. De ce sentiment d'être seule. De tout. Elle s'arrête peut à peu de pleurer. Aussi par ce qu'elle n'a plus de larmes. Je regarde l'heure. Il est 17h17. On fait un voeu et on s'interdit de le faire sur eux. Elle me dit qu'elle doit partir, par ce qu'elle a 5 appels en absence de sa mère et qu'elle devrait être rentrée et qu'en plus de cela, elle a séché un cours ce matin et qu'elle va surement se faire prendre un savon. Elle se lève. On se regarde. Ca m'a rappelé le mec de la librairie. Dans nos yeux, on se demandait ce qu'on faisait. Je sais pas. Je pense que c'était à elle de décider par ce qu'elle s'était beaucoup confié. A elle de choisir de faire cela une parenthèse ou autre chose. A sa place, j'aurais surement choisis la parenthèse. Elle a fait "Je m'appelle Mathilde et toi ?" "Julie" "Bon bah au revoir Julie." Elle tend la joue, on se fait la bise. Et elle s'en va. je la regarde s'éloigner. Le regard vide.

Je monte les marches de la médiathèque, enfin. J'emprunte quelques livres mais je n'ai plus le temps de m'arrêter bosser là bas. La philo la philo. Je vais dans des librairies et je rentre à la maison. Vivien, mon frère : "Alors ca a été ?". "Oui oui". "Tu as bien travaillé ?" "Oh, oui, beaucoup."


Mon week-end, il est étrange. Il y a le pot avec Lui et les amis. La soirée qui s'annonce trop mal et qui en fait se finit superbement. A deux, à discuter avec la copine de mon beau frère pendant des heures et des heures avec du vin blanc et des pâtes au saumon. Il y a le retour à la maison le lendemain. Mathilde, l'après midi. La soirée chez les filles le soir, les retrouvailles, les rencontres, l'alcool et le combo "Doors-clopes-alcool-refesagedemonde" en fin de soirée. Il y a ce matin décalé et la philo en plan. 

Je relirai cela plus tard.

Par Cold.Chocolate le Dimanche 27 septembre 2009 à 13:11
Y'a des moments comme ça, étranges, rares, qu'ils ne faut peut-être pas essayer de comprendre, juste les vivre.
Par maud96 le Dimanche 27 septembre 2009 à 15:03
Quand on prend le temps de lire ce long récit, on est assez "scotchée"... et, à part l'échange de prénoms, pas d'échanges de n° de téléphone ?
Ce genre de rencontres, on ne sait jamais si on réagit bien ou mal... mais c'est quand même toi qui a pris l'initiative, et je trouve çà assez admirable : il y a tant d'indifférence !
Par alesia le Dimanche 27 septembre 2009 à 15:24
le paquet de mouchoirs, c'est dans ce genre de moment qu'on regrette de pas en avoir un dans son sac.
J'ai rencontré une jeune fille qui pleurait, un jour. Je lui ai tendu un mouchoir. Un peu comme toi. Sauf que pour moi, ça s'est arrêté là. Elle a refusé le mouchoir, et est partie. Mais tant pis. J'avais fait ce que j'avais pu.

Il y a des rencontres, comme ça. Comme celle que tu décris. Des rencontres où on se dit que la vie se joue de nous, c'est vrai. Mais j'aime ces moments, ils sont un peu magiques. De drôle de coincidence. Comme si la vie avait un message à nous adresser..

En réponse à ton commentaire sur ton blog, c'est exactement ça, oui. Un apprentissage de la féminité, sûrement. Sauf que, tu vois, même à mon âge, les jolies robes et tout, j'ai l'impression que c'est encore un déguisement. Que ce n'est pas fait pour moi. Que je suis trop petite pour ça.. Héhé. Je me reconnais bien dans cette dernière phrase.. Tj la même peur de grandir..

Bonne journée !
:)
Par Memory le Dimanche 27 septembre 2009 à 16:09
Je dirai comme Cold.Chocolate qu'il y a de ces moments, si étranges, qu'il ne faut pas essayer de comprendre, mais qui marquent. Une rencontre éphemère. Je trouve que ton geste était beau d'aller la voir, je pense que dans des moments où on est à la place de "Mathilde", on a envie d'être seul(e) mais au fond on a envie d'être reconfortée, comprise et aidée, même par un(e) inconnu(e).

(Ps: Merci de souvent passer voir mes photos, ça me fait plaisir :) )
Par Got-a-secret le Dimanche 27 septembre 2009 à 17:24
C'est étrange, ce hasard en tout cas.. C'est sûr que ça arrive et que ça n'arrive ou que ça n'ait pas arrivé qu'à toi. Cette année, je suis très attirée par le prof que ma soeur adorée aussi.. Mais même si j'aime bien rêvée de tout ça, ça ne va pas plus loin. Mais je peux bien imaginer des sentiments plus grands.

Oui j'ai acheté une robe chez nafnaf, c'était pas trop mon truc de sortir en robe et talons, l'impression d'être déguisée. Enfin surtout avec ces talons.

Et pour les maths.. bon dejà tu sais que c'est pas la même chose entre les maths ES et L , et puis moi j'ai toujours eu des difficultés.. Mais je vais prendre un prof de maths là, j'essaye de pas abandonner trop vite :)
Par castor le Dimanche 27 septembre 2009 à 18:07
Ouais bah moi j'adore la photo du haut de ton habillage VOILA!!
Par LambeauxDeVie le Dimanche 27 septembre 2009 à 22:19
Je. J'en perds mes mots. Il y a des instants de vie, comme ça, sur lesquels on n'arrive pas à mettre de mots.

6 semaines. 6 semaines que l'espoir et le vide me rongent tour à tour. Et pas une larme. Pas une seule. J'ai passé le week-end avec ma Merveilleuse qui a essayé de voler à mon secours. Mais rien. Pas un mot pour expliquer. Pas une larme. J'ai juste mal.
Par Satine le Lundi 28 septembre 2009 à 13:04
jaime tellement les moments insolites comme ca que la vie met parfois en travers de nos chemins <3
t'es adorable d'avoir cherche a la reconforter comme ca. des gens comme toi il en faudrait beaucoup plus!
Par Madness.of.Love le Mardi 29 septembre 2009 à 23:44
J'ai lu dès que cet article est paru (c'est ça la classe d'avoir une alert dès que tu publies un article haha !), mais je ne savais pas quoi commenter.
Et je t'avoue que je ne sais toujours pas quoi dire.

Simplement que les coïncidences sont trop fortes, parfois. Tu m'as émue, être allée voir cette fille, simplement ainsi... C'est quelque chose de très beau que tu as fait.

Ce que j'aime te lire ! =D
J'espère que tu as réussi à boucler la philo. Moi oui \o/ !

Je t'embrasse.
Par monochrome.dream le Jeudi 1er octobre 2009 à 14:02
Deuxième lecture... la première, c'était dimanche entre deux mails :)

Sacré pied-de-nez de madame la vie... qui se fiche vraiment de notre poire, en semant des coïncidences de partout ! Ce qui est étrange dans cette situation, c'est que vous étiez toutes les deux à la fois consolante et consolée. Je me demande, comme Maud, si tu as gardé contact avec elle, finalement...
Par imparfaiite le Samedi 3 octobre 2009 à 13:19
Non, je pense que si elle est avait voulu me donner son numéro, elle l'aurait fait.donc, juste les prénoms :)
Par Princess-Maorie le Samedi 3 octobre 2009 à 18:45
wow ! Mwa je dis que tu as vachement de courage et que tu es trop trop gentille ! (mais ça je le savais déjà ! ^^)Même si j'avais voulu l'aider cette Mathilde, je ne suis pas sûre que j'aurai trouvé le courage de faire le premier pas vers elle...
 

Chuchoter à l'oreille









Commentaire :








Votre adresse IP sera enregistrée pour des raisons de sécurité.
 

La discussion continue ailleurs...

Pour faire un rétrolien sur cet article :
http://imparfaiite.cowblog.fr/trackback/2910948

 

<< Présent | 1 | 2 | 3 | 4 | 5 | Passé >>

Créer un podcast