Et elle pleura. A côté d'elle, le feu brulait mais la chaleur qui se dégageait de ces braises ardentes ne savait la réchauffer réellement. Elle était froide, tout était froid. Elle tentait vainement de parler mais elle était étouffée par ses sanglots. Ces pleurs qui, décidément, ne venaient jamais comme il faut, quand il faut. Ces pleurs que l'on ne contrôle pas. Les larmes coulaient et elle ... elle s'en voulait de sa faiblesse. Elle s'en voulait de n'être pas heureuse. Elle s'en voulait de ressasser les mêmes choses stériles. Alors, elle prenait une profonde inspiration et tentait d'expliquer, de s'expliquer, pour soi même, pour l'autre, une nouvelle fois. Et, expliquer à voix haute tout cela lui faisait entrevoir de nouvelles choses, toujours plus douloureuses. Et elle s'en voulait là aussi, elle se disait qu'elle insistait sur une blessure qui n'avait pas besoin de cela. Et puis, cela lui rappelait qu'elle était bloquée, elle le savait. Cette semaine à ne rien faire, à se laisser vivre, en culpabilisant de ne rien faire justement avait un désagréable goût de déjà vu. Cette douleur, cuisante, avait un goût d'échec et de ... retour à la case départ. C'était faux, bien sûr elle n'était pas la même, mais elle était de nouveau bloquée. Et elle devait continuer à gérer cela tout de seule. "Tu ne devrais pas tu sais". Mais qui ? Qui pouvait l'aider ? C'est toujours la même chose, quand elle décidait de se confier, on lui répondait qu'on ne savait rien, que la situation était en effet compliquée. On balançait deux trois phrases banales et on la laissait se débrouiller. C'était normal. Et même si, bien évidemment, elle ne s'en voulait qu'à elle même, elle en avait marre. Marre de se dépétrer dans cette stupide histoire tout de seule. Bien sûr, il y avait la psy aussi, mais elle ne la voyait pas assez souvent et elle avait dû annuler plusieurs rendez vous. Tout revenait au même point, elle était tout de seule. Elle se disait, se persuadait qu'elle devait avoir les solutions en elle, mais là elle était bloquée bloquée bloquée ! Elle sentait qu'elle n'était pas capable de beaucoup de choses et elle n'entrevoyait pas l'avenir. Et puis, il y avait lui, qui commentait à changer de son côté ! Comme s'il elle avait besoin de cela ! Elle entrevoyait le pathétisme de la situation, une nouvelle fois, comme un nouveau coup de couteau dans le ventre. Toujours toujours toujours. Elle ne pouvait s'empêcher d'avoir honte, de détester cette situation ridicule qui, au fond, ne tenait bien qu'à elle. C'était elle qui avait tissé cette toile où elle se trouvait emprisonnée. Mais sans pouvoir rien faire. Rester impuissante devant le déroulement puissant et incontrolable de ses sentiments. En même temps, cette situation, elle osait penser qu'elle ne l'avait pas tissé par pur hasard . Mais ... Que lui apprenait-elle ? L'amour ? Oui, mais elle n'avait pas besoin de toute cette mascarade, de toutes ces douleurs en guise de bonus. Alors .... A quoi cela servait-il vraiment ? A QUOI SON INCONSCIENT VOULAIT-IL EN VENIR A LA FIN ? Ne ... pouvait -on tirer un trait sur tout cela ? C'était ... vraiment trop demandé ? Mais .... pourquoi ? La fatigue accumulée commençait à lui peser. Elle murmura "Toujours ce manque, que l'on comble comme on peut." Oui, il y avait cela aussi. Elle mangeait trop, elle savait pourquoi. Cela aussi, ce n'était pas insurmontable, pourquoi n'y arrivait-elle pas ? A retrouver un rapport sain à la nourriture ? Elle était lasse d'attendre. Elle bouillonait à l'intérieur. Ce trop plein d'amour la fatiguait. Ces nuits, elle dormait mal. Penser à des milliers de choses. La tête qui lance un appel d'air, en vain....
Et puis il y avait les rêves, si puissants, si présents ces derniers temps. On voulait surement lui dire des choses. Mais pourquoi maintenant ? Pourquoi tout en même temps ? Etait-ce lié ? Pouvait- elle réellement comprendre ou , du moins, entrevoir ? Elle n'y arrivait pas. C'est vrai, elle n'essayait pas tant que ça, elle était trop lasse. Elle avait envie d'oublier aussi, de s'oublier un peu aussi, de faire une pause. une toute petite pause. Elle se remit à penser. Elle se souvint d'un rêve, elle s'en souvint trop bien même. Elle avait rêvé de son père, cela faisait si longtemps. Et elle en avait rêver de telle manière, que, quand elle s'était réveillée, elle s'était mise à douter : Etait-il bien mort ? Et la réponse qui vint la frapper, un nouveau coup, la propulsa violemment dans la réalité, cette réalité dont elle n'arrivait pas à entrevoir l'issue. Comme il était encore nuit, elle se rendormit, presque aussitôt. Mais ce fut de nouveaux rêves étranges et puissants, de nouvelles images qui la martelaient. Même la nuit, la nuit réparatrice semblait l'abandonner. Jamais elle ne pouvait lacher prise. Jamais. On tentait de la mettre devant quelque chose, surement, mais quoi ? Elle soupira, encore. Elle s'en voulu, de nouveau. Elle était ingrate, surement, comme toujours. Cercle vicieux de merde dont elle était la seule maîtresse.
Mais je chante. Cela me fait tellement de bien. Même si ma voix ne me plais pas. Je chante. De toutes les manières que je peux entrevoir. J'ouvre la fenêtre. Je ferme mes yeux, encore mouillés. Et je me libère, un peu. Les sons qui résonnent. Toujours. La main tendue de l'art. Encore lui, décidément, essentiel. Et puis, se lever, danser, s'abandonner d'une autre façon. Les gestes sont d'abord mécaniques puis, prennent de l'assurance. J'ai peut être trop bu ce soir, la tête me tourne un peu. Je m'en fiche.